Mardi 14 avril dernier, Gilbert est arrivé fatigué au siège du CIRA du Limousin. C’était une halte sur la route du salon libertaire de Gand. Le CIRA du Limousin : il connaissait bien, Gilbert, il était l’un des fondateurs. C’est là qu’il s’est endormi, après avoir revu les amis, une dernière fois. Il ne s’est pas réveillé. Cette fin lui ressemble, au fond.
Depuis 68, il en avait connu des combats et des engagements. Au Jargon Libre, à la Fédération Anarchiste, à la CNT, à l’UPF… Solidaire des GARI, il avait participé à des opérations spectaculaires comme l’enlèvement de la statue de Juan Carlos au Musée Grévin, à l’attentat contre la statue de Saint-Louis au Palais de Justice de Paris. Anarchiste-cambrioleur, il a gouté au cachot. En 1998, il rejoint René Bianco au CIRA de Marseille. Commence alors le long périple. A l’instar d’Anselmo Lorenzo qui parcourait l’Espagne accompagné d’une mule chargée de brochures, Gilbert a parcouru la France et l’Europe pour présenter les livres du CIRA, lors des salons et des conférences. Il amenait aussi des caisses de vin, toujours bon, pour financer l’achat d’un nouveau local pour le CIRA de Marseille. Ce local, il existe maintenant, tout comme son projet de développer un CIRA dans le Sud-Ouest. Au cours de son long voyage, Gilbert s’était arrêté aux premières journées libertaires que nous organisions à Pau. Comme une évidence, nous avons trouvé en lui l’un des notre, au premier contact. Depuis, sa présence et le stand du CIRA ont fait partie des journées. Quand nous nous rendions à Marseille, nous avions plaisir à le retrouver, autour de pieds paquets et d’un bon vin. Ami fidèle et discret, bon compagnon tranquille et déterminé, Gilbert va nous manquer.
C’était un vieux cheval fourbu apportant chaque année son trésor d’idées libres. Qui nous amènera les livres, à présent ? Nous ouvrirons une bouteille de la cuvée du CIRA en pensant à toi, nous embrassons ta fille et tous les tiens puisque nous ne te serrerons plus jamais dans nos bras.